Odell Barnes Jr.

L'association Lutte Pour la Justice (LPJ) a été créée en 1999 pour soutenir Odell Barnes Jr., jeune afro-américain condamné à mort en 1991 à Huntsville (Texas) pour un crime qu'il n'avait pas commis et exécuté le 1er mars 2000 à l'aube de ses 32 ans. En sa mémoire et à sa demande, l'association se consacre à la lutte pour l'abolition de la peine de mort aux Etats-Unis et en particulier au Texas. (voir article "Livre "La machine à tuer" de Colette Berthès en libre accès" ) : https://www.lagbd.org/images/5/50/MATlivre.pdf

jeudi 8 octobre 2009

Le témoignage d'un condamné sorti vivant de son exécution

L'histoire d'un condamné américain ayant survécu à son exécution relance le débat de la méthode d'injection mortelle aux Etats-Unis.

Romell Broom (ci-contre) est le premier condamné à mort à survivre à son exécution aux Etats-Unis depuis 1946. Ce détenu de 53 ans, accusé du viol et du meurtre d'une adolescente de quatorze ans, a subi pendant deux heures mardi 15 septembre les assauts des trois membres de l'équipe d'exécution de l'Etat de l'Ohio. En vain, ces derniers ont piqué ses bras, ses mains et ses jambes 18 fois. Le directeur de la prison a finalement jeté l'éponge, son équipe n'ayant pas réussi à isoler une veine susceptible de supporter le cathéter par lequel l'injection mortelle est diffusée. Trois jours après son exécution manquée, Romell Broom à raconté son expérience dans un témoignage sous serment, dont l'AFP s'est procuré la transcription.

Il aide l'équipe d'exécution

Alors qu'il est allongé pendant les préparatifs à l'injection mortelle, l'équipe d'exécution pose les intraveineuses qui diffuseront ensuite trois produits: un qui anesthésie le condamné, un qui paralyse ses muscles et un qui arrête son coeur. "Il y avait trois gardes dans la pièce, un à ma droite, un à ma gauche et l'autre à mes pieds", raconte le rescapé. "L'infirmière a essayé trois fois d'accéder à mes veines au milieu de mon bras gauche" ajoute-t-il. Nouveaux essais, "deux fois dans le bras gauche". "L'infirmière doit avoir touché un muscle parce que la douleur me fait hurler". "Trois fois dans le bras droit". Une veine semble assez solide, l'infirmier tente d'installer le cathéter mais celui-ci cède. "Du sang a commencé à couler sur mon bras", raconte Romell Broom. Deuxième pause. Un gardien lui tapote l'épaule et lui conseille de se détendre. "A ce moment-là, j'avais très mal, les blessures dues aux piqûres m'empêchaient de tendre ou de bouger mes bras". Romell Broom tente alors d'intervenir en aidant les infirmiers à poser le garrot. "J'ai commencé à m'énerver. Je pleurais, j'avais mal et mes bras étaient enflés, les infirmiers piquaient dans des zones déjà contusionnées et gonflées, j'ai demandé qu'on arrête et j'ai demandé à parler avec mon avocate", explique-t-il. Finalement, le directeur de la prison lui fait savoir que la procédure est suspendue. Ses avocats ont déposé depuis des recours contre une nouvelle exécution et deux autres exécutions prévues à l'automne dans l'Ohio ont été suspendues.

Un débat relancé

L'échec de l'exécution de Romell Broom a relancé le débat aux Etats-Unis sur les méthodes d'injection mortelle. "Même après cette effroyable exécution ratée, l'Ohio veut continuer à tuer des gens (...), il devrait à tout le moins déclarer un moratoire de manière à être sûr qu'il possède les compétences techniques pour tuer les gens avec humanité", écrivait samedi 3 octobre le New York Times dans son éditorial."Chaque Etat devrait utiliser ce moment de honte pour s'interroger sur la peine capitale", insiste le quotidien."Les exécutions dans l'Ohio sont suspendues jusqu'à ce que ce dossier soit réglé, ça peut prendre six mois ou un an", a expliqué Richard Dieter, directeur du Centre d'information sur la peine de mort (DPIC), sauf si la Cour suprême levait le sursis. Le gouverneur a estimé de son côté que ses équipes devraient avoir mis au point une "solution alternative" en cas de problème d'ici début décembre.

Initiée en 1982 et déjà pratiquée aux Etats-Unis sur plus de 1.000 condamnés, la méthode d'injection mortelle a pour but d'offrir au condamné et aux témoins une mort rapide et paisible. Mais elle suppose de faire pratiquer une intraveineuse à des équipes plus ou moins formées aux soins médicaux, aucun médecin ne pratiquant lui-même l'injection. Et si le premier produit est mal administré, les deux autres peuvent causer une douleur immense. En décembre 2006, Angel Diaz a vécu une pénible agonie de 34 minutes: les produits avaient été injectés dans ses muscles.

Selon des informations communiquées par les autorités de l'Ohio et rapportées par l'Associated Press le 7 octobre 2009, l'administration pénitentiaire envisage comme "solution alternative" de pratiquer les injections mortelles directement dans les muscles ou dans la moelle osseuse du condamné.

Source: Nouvelobs.com avec AFP et Death Penalty News, 6 octobre 2009

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