Le régime chinois est désormais conscient du poids que la Chine pèse sur l'économie mondiale. Rien ne semble pouvoir le faire céder quand à sa façon très particulière de faire respecter les droits de l'homme, qui provoque l'indignation internationale.
Le 25 décembre, le plus connu des dissidents chinois, Lu Xiaobo, a été condamné à onze ans de prison pour avoir rédigé une charte appelant à une transition démocratique pacifique et publié des textes critiques sur Internet. Onze ans de prison pour avoir eu le malheur d'être un écrivain, une peine des plus lourdes pour un crime de rédaction.
Les Etats-Unis et l'Union européenne (UE) ont vertement réagi à ce verdict, demandant à plusieurs reprises à Pékin de relâcher ce dissident de 53 ans. Les diplomates étrangers qui ont tenté de se rendre au tribunal où la sentence allait être prononcée, samedi 26 décembre, n'ont pas été autorisés à assister au procès. On leur a signifié à l'entrée qu'il "n'y avait plus de place pour s'asseoir".
Mardi 29 décembre, un autre homme de 53 ans, britannique celui-là, a subi de manière plus définitive encore la violence de la justice chinoise. Accusé de trafic d'héroïne, Akmal Shaikh a été exécuté par injection sans que les appels à la clémence aient été entendus par le gouvernement de la République populaire. Les interventions du premier ministre britannique Gordon Brown et du Foreign Office n'y ont rien fait. La Cour suprême de Chine avait validé mardi la condamnation quelques heures plus tôt.
Triple génuflexion
Une décision qui soulève d'autant plus l'indignation que M. Shaikh, si l'on en croit ses proches, pourrait bien être mentalement dérangé au point de ne pas être responsable de ses actes. La justice chinoise a refusé jusqu'au bout de faire subir au condamné un examen médical qui aurait pu confirmer - ou infirmer - les dires de sa famille. Elle aurait permis au moins de lever l'ambiguïté. Là non plus, les pressions exercées n'auront servi à rien.
Le contexte international très particulier de 2009 - l'année où le "dragon chinois" aura pour de bon redressé la tête après la grande fête des Olympiades de 2008 - et l'importance accrue de son rôle durant la crise financière mondiale augurent mal de la possibilité pour la communauté internationale de convaincre Pékin de lâcher du lest sur la question des droits de l'homme.
Des grands pays de la planète, elle est sans doute le régime le plus dur à réprimer ses dissidents, ses minorités ethniques (Tibétains, Ouïgours), et à imposer partout et sur chacun de ses citoyens la dure loi d'un parti unique dont la seule obsession est de se survivre à lui-même.
A l'étranger, le régime de Pékin ne se soucie guère de la nature des gouvernements avec lesquels il collabore, n'hésitant pas à financer les dictateurs les moins recommandables au nom de ses intérêts économiques et de son besoin de matières premières.
Des Etats-Unis à l'Europe, l'extrême déférence observée par les dirigeants avec la Chine fait penser à la triple génuflexion jadis obligatoire devant les empereurs qu'à un comportement d'égal à égal face à une grande puissance émergente désireuse de reprendre sa place dans le cercle des nations. Mais, en décidant de réprimer et d'exécuter comme elle vient de le faire ces derniers jours, la Chine n'aura fait qu'entériner ce qu'elle ne supporte pas qu'on lui dise : elle est un régime despotique de plus en plus sûr de lui et dominateur.
DES EXÉCUTIONS EN HAUSSE
Selon Amnesty International, sur les 2 400 exécutions de condamnés à mort en 2008 dans le monde, 1 700 auraient eu lieu en Chine. Des experts estiment que le chiffre réel est plus élevé.
Selon l'association des droits de l'homme Diu Hua, qui a un représentant à Hongkong, 5 000 condamnés à mort pourraient être exécutés en Chine cette année. Il y en aurait eu jusqu'à
10 000 dans les années 1990. Mais le manque de transparence du système ne permet pas d'aller au-delà de ces approximations.
Généralement, les exécutions se font par une balle dans la nuque, mais la mort par injection est de plus en plus appliquée : 68 crimes sont sur la liste des crimes punis de la peine de mort dont le trafic de drogue et la corruption.
Source: lemonde.fr, 29 décembre 2009
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