La Française Sandrine Ageorges, militante abolitionniste, mène son plus dur combat. Son mari américain, Hank Skinner (photo ci-contre), doit être exécuté le 24 février au Texas.
Dix ans déjà. Dix ans que Sandrine Ageorges mène une double vie. "Une existence coupée en deux", comme elle dit. A Paris, elle est directrice de production, spécialiste des tournages de films américains en France. A Houston, au Texas, où elle passe six mois de l'année, elle se bat pour obtenir la réouverture du procès de Henry Watkins "Hank" Skinner, 47 ans, condamné à mort en 1995 pour triple meurtre, dont la date d'exécution est fixée au 24 février. L'homme qu'elle aime. Son mari depuis le 3 octobre 2008.
Deux vies, deux mondes entre lesquels court le fil d'Ariane de son engagement contre la peine de mort. Abolitionniste passionnée depuis l'adolescence, Sandrine a découvert le système judiciaire et carcéral made in USA à travers Lamp of hope (Lampe d'espoir), une association de condamnés à mort américains dont elle est devenue la traductrice. En 1996, elle a entamé une correspondance avec trois prisonniers. L'un d'eux s'appelait Hank Skinner. "Ses premières lettres faisaient 40 pages", se souvient-elle. Elle s'est aussi engagée dans la Coalition texane pour l'abolition de la peine de mort. Depuis 2008, elle la représente au sein du comité de pilotage de la Coalition mondiale, dont le 4e Congrès s'ouvre à Genève le 24 février.
Aucun contact physique, jamais
C'est en 1996 que Sandrine (photo ci-contre) a rencontré Hank pour la première fois à la prison d'Ellis, à Huntsville, haut lieu des mises à mort ordonnées par la justice du Texas. La première d'une très longue série de visites, plus ou moins espacées, au gré des décisions de l'administration pénitentiaire. Aucun contact physique, jamais: Hank et Sandrine se parlent par téléphone, à travers une épaisse paroi de Plexiglas.
Ou, plutôt, se parlaient. Depuis vingt mois, la Française est interdite de contact avec le détenu, incarcéré depuis l'automne à Polunsky, le "couloir de la mort" des condamnés texans. "L'administration carcérale se méfie, explique Sandrine. Nous n'avons cessé de dénoncer les conditions de détention des condamnés." Le jour de leur mariage, c'est son amie Nancy qui tenait le rôle de Hank devant le juge de Houston.
"J'avais toujours été célibataire jusque-là, confie la mère de Daphné, 22 ans, future sage-femme. Mais porter le nom de Hank, c'est porter son combat. Et pouvoir continuer à suivre son dossier si les choses tournent mal." Sandrine flanche un court instant. Puis reprend: "Je veux le sauver, je veux que la vérité éclate." Non, son mari n'a pas tué sa compagne, Twila Busby, ni les deux fils adultes de celle-ci, le 31 décembre 1993. Elle dénonce une enquête à charge, un procès bâclé, un avocat négligent, un témoin clef qui s'est, depuis, rétracté, et des éléments matériels jamais exploités - une veste d'homme retrouvée sur les lieux du crime, deux couteaux et un torchon ensanglantés, les ongles cassés de Twila.
La défense de Hank a tiré ses dernières cartouches. Deux procédures sont en cours, l'une devant une cour d'appel fédérale, l'autre devant la Cour suprême. Par ailleurs, les avocats doivent déposer ces jours-ci un recours en grâce auprès du gouverneur du Texas - la perpétuité plutôt que la mort. "J'ai longuement hésité, soupire Sandrine. Parce qu'il est innocent, Hank s'est toujours opposé à une commutation de peine. Mais ma priorité, aujourd'hui, c'est de gagner du temps..."
Source : lexpress.fr, 8 février 2010
Cliquez ici pour en savoir plus sur le dossier de Hank Skinner (en anglais et en français)
Cliquez ici pour signer une lettre en ligne destinée au Board of Pardons and Paroles du Texas
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