Odell Barnes Jr.

L'association Lutte Pour la Justice (LPJ) a été créée en 1999 pour soutenir Odell Barnes Jr., jeune afro-américain condamné à mort en 1991 à Huntsville (Texas) pour un crime qu'il n'avait pas commis et exécuté le 1er mars 2000 à l'aube de ses 32 ans. En sa mémoire et à sa demande, l'association se consacre à la lutte pour l'abolition de la peine de mort aux Etats-Unis et en particulier au Texas. (voir article "Livre "La machine à tuer" de Colette Berthès en libre accès" ) : https://www.lagbd.org/images/5/50/MATlivre.pdf

vendredi 11 octobre 2024

Urgence pour sauver Robert Roberson.

 

Amis,

 C'est fini. Il nous reste moins d'une semaine pour empêcher l'exécution de Robert Roberson pour un crime qui n'a jamais eu lieu. Si vous n'avez pas signé la pétition adressée au gouverneur Abbott, faites-le aujourd'hui et partagez-la avec tous ceux que vous connaissez qui se soucient de la justice ! Et si vous avez déjà signé, continuez à la partager largement.

Le lundi 7 octobre 2024, les avocats de Roberson ont déposé une motion d'urgence demandant à la Cour d'appel pénale du Texas (CCA) d'accorder un sursis d'exécution. Les avocats de Roberson ont également exhorté le tribunal à reconsidérer son refus précédent d'accorder un sursis d'exécution sur la base de nouvelles preuves qui montrent encore une fois comment une loi d'État révolutionnaire conçue pour empêcher les condamnations injustifiées n'a pas été appliquée comme prévu dans son cas. 

Deux jours plus tard, le mercredi 9 octobre 2024, la Cour d’appel du Texas a accordé un nouveau procès à un homme de Dallas au motif que sa condamnation de 2000 dans une affaire de bébé secoué/impact secoué (SBS) devait être annulée car elle était fondée sur des connaissances scientifiques qui ont depuis évolué. La Cour a également estimé que le « témoignage scientifique admissible » dans un nouveau procès aujourd’hui « conduirait probablement à un acquittement ».

En réponse à la décision de la Cour dans l’affaire Andrew Roark, Gretchen Sims Sween, Ph.D., J.D., l’avocate de Roberson, a fait la déclaration suivante :

 « Aujourd’hui, quelque chose de remarquable s’est produit : la Cour d’appel pénale du Texas a judicieusement jugé que l’hypothèse du bébé secoué utilisée pour condamner un homme de Dallas nommé Andrew Roark n’a pas résisté à l’examen minutieux au fil des avancées scientifiques. Par conséquent, il mérite un nouveau procès. Cette même hypothèse du bébé secoué – comprenant un témoignage pratiquement identique du même spécialiste de la maltraitance des enfants – a été utilisée pour condamner Robert Roberson en 2003 dans le comté d’Anderson, au Texas. 

Étant donné qu’il n’existe aucune distinction significative entre les cas de M. Roark et de M. Roberson en termes de théorie de la cause des blessures de l’État, et que M. Roberson a depuis apporté des preuves accablantes des causes naturelles et accidentelles de la mort tragique de sa fille très malade, il devrait lui aussi, en toute logique, bénéficier d’un nouveau procès. »

La demande de clémence de Roberson reste entre les mains du Texas Board of Pardons and Paroles et du gouverneur Abbott ; une motion visant à annuler son mandat d’exécution illégal est également en attente. 

Tous les yeux seront tournés vers le Texas dans les jours critiques à venir, alors que notre État se rapproche dangereusement de devenir le premier à exécuter quelqu’un sur la base de l’hypothèse discréditée du syndrome du bébé secoué. Vous jouez un rôle important dans cette cause juste pour sauver Robert Roberson, et je vous en suis vraiment reconnaissant.

Vers la justice, 

Kristin Houle Cuellar, pour TCADP

Pour signer la pétition adressée au gouverneur Abbott allez sur le site suivant et remplissez, à droite de la page, le formulaire Sign the petition to Gov. Abbott et cliquez sur "submit":

https://innocenceproject.org/petitions/justice-for-robert-roberson/

 

lundi 2 septembre 2024

Petition Texas: Glen White

Notre cher ami (Garcia) Glen White, alias Big White, a été condamné à mort pour le 1er octobre 2024. Il s'agit de sa deuxième date d'exécution, après 2015, lorsqu'il a obtenu un sursis. Nous sommes contre la peine de mort, que nous considérons comme barbare car il s'agit d'un meurtre de sang-froid commis par votre propre État contre l'un de ses citoyens, indépendamment du fait qu'il est prouvé qu'elle touche principalement les personnes issues de minorités et les indigents, ce qui montre qu'il ne s'agit pas d'une véritable justice mais d'une vengeance exercée sur les plus démunis. En tant que militants contre la peine de mort, nous avons rencontré Glen dans le couloir de la mort du Texas et sommes rapidement devenus amis avec cet homme qui montre clairement que nous sommes bien plus que nos actes et le pire jour de notre vie et que la réhabilitation existe vraiment, y compris dans le couloir de la mort. Nous avons été touchés par son humanité malgré les terribles conditions de vie qu'il endure et par sa compassion pour nos propres problèmes.

Nous avons parlé de Dieu, car sa foi est très puissante et a soutenu cet homme à travers cette véritable épreuve appelée couloir de la mort, en particulier l'isolement, qui est particulièrement déshumanisant. Nous avons chanté des gospels ensemble et nous avons prié. Par sa foi et son humanité, il nous a aidés, ainsi que ses nombreux amis dans le couloir de la mort et à l'extérieur, à traverser des moments difficiles. Il a beaucoup mûri au fil des années depuis qu'il a été envoyé dans le couloir de la mort, et nos interactions personnelles avec Glen reflètent sans aucun doute son humanité, sa gentillesse et son amour pour les autres. Notre ami Glen s'est également excusé, a regretté et est très plein de remords pour les choses qu'il a faites et il sait que Dieu lui a pardonné et lui a montré sa miséricorde et sa grâce et surtout son amour aussi... Et aujourd'hui, notre ami est une meilleure personne et a changé et a fait de son mieux pour être utile aussi et être là pour les autres et pour aimer comme Dieu nous aime tous...

Voici les raisons pour lesquelles Glen devrait bénéficier de la clémence et d'un sursis. Veuillez signer cette pétition. Écrivez et appelez le gouverneur Abbott :

https://gov.texas.gov/contact

 Écrivez à la commission des libérations conditionnelles et des grâces : bpp_clemency@tdcj.texas.gov

https://chng.it/BvNV462C4Q

Anne-Sophie Mine

lundi 29 juillet 2024

LA PLUME ET LE POING : un livre d’art dédié au combat pour la libération de Mumia Abu-Jamal

 LA PLUME ET LE POING : un livre d’art dédié au combat pour la libération de Mumia Abu-Jamal

Vous pourrez acheter ce livre par l’intermédiaire de trois réseaux de diffusion : l’éditeur (Le Temps des Cerises), les libraires et le Collectif Mumia. Nous attirons toutefois votre attention sur le fait que seul le Collectif Mumia reversera la totalité des bénéfices de la vente du livre à la défense juridique et judiciaire du journaliste afro-américain en prison depuis 42 ans.

Cette solidarité n'a été rendue possible que par une réduction substantielle du prix de livre consentie par l'éditeur au Collectif Mumia (auteur du livre).

Ce livre exceptionnel rassemblant plus d’une centaine d’images d’œuvres artistiques sera publié à l’occasion de la Fête de l’Humanité en présence d’Angela Davis et de Johanna Fernandez (porte-parole de Mumia). Ces deux personnalités participeront à plusieurs évènements les 14 et 15 septembre au village du monde, au village du livre et au stand Mumia de la fête.

Nous vous invitons à nous adresser dès à présent VOTRE COMMANDE à l’aide du BON en pièce jointe. Les organisations et les collectivités territoriales peuvent également nous faire parvenir leur réservation et apporter ainsi un soutien financier au combat pour la libération de Mumia.

 

COLLECTIF FRANCAIS LIBÉRONS MUMIA

rassemblant une centaine d'organisations et de collectivités territoriales

MEMBRE DE LA COALITION MONDIALE CONTRE LA PEINE DE MORT

Pour suivre toute l'actualité sur cette affaire, rendez vous sur notre site :

www.mumiabujamal.com





vendredi 7 juin 2024

Remerciements de Colette Berthes

 Tout d'abord je veux encore une fois vous remercier, vous tous et toutes encore adhérents à LPJ ou l'ayant été pendant longtemps, et/ou donateurs qui avez soutenu nos actions et de nombreux condamnés – dont plusieurs ont été exécutés mais dont certains, grâce à vous et à nos soutiens et avocats aux États Unis, ont pu échapper à la peine capitale.

Ce fut une aventure commencée en 1996 - 28 ans pour moi - et pour beaucoup d'entre vous 25 ans et même plus. Alors encore une fois merci. Car Odell a été exécuté le 1er mars 2000 et tout aurait pu s'arrêter là. Et ça a continué jusqu'à ce jour!

Ne soyons pas tristes ni déçus de devoir nous arrêter, nous avons fait notre part et d'autres personnes ont pris le relais. Une de mes grandes fiertés, en tant que présidente de l'association, est que LPJ a remis, dès 1998, les problèmes liés à la peine capitale sur le devant de la scène française puis européenne et que nous avons été à l'origine d'une action maintenant internationale ( La coalition mondiale) quand nous avons lancé en 2000 l'idée d 'une Coalition Européenne et tenu les premières réunions.

Merci aussi à Save-Innocents et à Emanuelle Purdon (Londres) qui a tant travaillé pour cette cause et nous a rejoints il y a quelques années.

Et pour celles et ceux qui ont encore des amis /correspondants à soutenir sachez que vous pouvez encore vous adresser à nous pendant quelques semaines. En attendant nous finissons d'envoyer les fonds que vous nous aviez confiés, ils seront utilisés par des avocats compétents et des associations sérieuses poursuivant notre but commun.

Et pour finir un remerciement personnel et sincère à toutes celles et tous ceux - y compris ceux qui nous ont trop tôt quittés - qui ont donné et donnent encore temps et énergie pour l'association, pour le CA, le blog LPJ, lettre capitale, les groupes de soutien à des condamnés etc. MERCI ! Sans ces bénévoles, très engagés, rien n'aurait pu avoir lieu.

Colette BERTHES

 

Rencontre avec Mumia à la prison de Mahanoy

 Rencontre avec Mumia à la prison de Mahanoy

Au terme de démarches administratives compliquées avec l'administration pénitentiaire et un long voyage, une visite à Mumia est toujours un moment de forte émotion... La délégation française a passé trois heures avec lui le 25 avril (photo en pièce jointe), le lendemain de son 70ème anniversaire fêté dans les rues de Philadelphie par des centaines de manifestants exigeant sa libération.

Après de chaleureuses embrassades, c'est la question de sa santé qui fut la priorité des questionnements. Toujours dans la discrétion, Mumia nous dit aller mieux grâce à l'action de ses soutiens pour obtenir les soins que son état exige. Son apparence contraste en effet avec les photos diffusées en début d'année. Il a repris du poids, ses cheveux repoussent et il s'astreint quotidiennement à des exercices physiques.

Nous l'informons du dépôt la veille de notre visite de la pétition " 1.000 soutiens de personnalités, d'artistes , d'auteurs, d'élus et de citoyens de France " remise au Gouverneur de Pennsylvanie et au Procureur de Philadelphie pour exiger sa libération (photos en pièces jointes). Faute de pouvoir lui montrer la maquette du livre d'art qui sortira en septembre prochain, nous l'informons que 170 artistes du monde entier ont répondu à notre appel en créant une œuvre pour manifester leur soutien à ses côtés.

La discussion s'est ensuite engagée avec ses visiteurs du jour pour répondre à leurs questions sur sa vie en prison durant quatre décennies, ses souffrances, son travail de journaliste derrière les barreaux, ses livres, sa passion pour les écrits et les idées de Frantz Fanon en relation avec l'actualité sur la Palestine assassinée ... Trois heures à l'écoute de cet homme calme et érudit, bouleversé par l'état du monde, la souffrance des peuples et les responsabilités incombant pour une large part à son pays.

On ne voit pas le temps passé. C'est l'appel du garde au micro qui nous invite à quitter les lieux. Mumia tient à nouveau à remercier tous ses soutiens de France si nombreux qui viennent de lui écrire pour son anniversaire avec l'espoir de pouvoir marcher prochainement dans les deux rues qui portent son nom près de Paris.

Derrière étreinte dans la salle de visite avant de repartir et des signes d'au revoir derrière les vitres qui nous séparent.

www.mumiabujamal.com


lundi 8 avril 2024

Progrès et obstacles de l’abolition aux États-Unis

 

https://worldcoalition.org/fr/2024/04/04/progres-et-obstacles-de-labolition-aux-etats-unis/

Progrès et obstacles de l’abolition aux États-Unis   

Déclaration

Publié par Russ Feingold & Christopher Wright Durocher, le 4 avril 2024

Lorsque le président Biden a remporté les élections de 2020, il est devenu le premier candidat à la présidence des États-Unis à s’opposer publiquement à la peine de mort.

Dans le cadre de sa promesse d’œuvrer en faveur de l’abolition, la campagne de M. Biden a souligné que « plus de 160 personnes condamnées à mort dans ce pays depuis 1973 ont été innocentées par la suite ». En 2021, le ministère américain de la justice a annoncé un moratoire sur les exécutions fédérales, reconnaissant notamment que « de graves préoccupations ont été soulevées quant à la poursuite de l’application de la peine de mort dans tout le pays ». Le président, sa campagne et le ministère de la justice ont raison de s’inquiéter d’un châtiment qui, même si l’on met de côté l’immoralité des exécutions sanctionnées par l’État, n’a jamais été appliqué de manière équitable, juste ou égale.  

C’est pourquoi il est particulièrement décourageant de constater qu’au début de l’année, le ministère de la justice, dirigé par un procureur général nommé par le président Biden, a annoncé qu’il allait requérir la peine de mort à l’encontre de Payton Gendron. En 2022, Gendron avait tué dix personnes noires lors d’une fusillade à caractère raciste dans une épicerie de Buffalo, dans l’État de New York. Avant que le ministère de la justice n’annonce l’application de la peine capitale, Payton Gendron avait déjà plaidé coupable des meurtres devant un tribunal de l’État de New York et purgeait une peine d’emprisonnement à perpétuité sans possibilité de libération. La justice, pour autant qu’elle puisse être rendue dans une situation aussi odieuse, avait déjà été rendue.  

L’American Constitution Society s’est élevée contre cette décision, l’un de ses auteurs, Russ Feingold, président de l’ACS, faisant observer que « en appliquant la peine de mort dans une seule affaire, quels que soient les faits de cette affaire, le gouvernement fédéral valide les meurtres sanctionnés par l’État en tant que politique et pratique ». Le fait est que la peine de mort aux États-Unis est entachée de dysfonctionnements. Toute évaluation honnête des systèmes juridiques pénaux utilisés pour enquêter, inculper capitalement, juger et finalement exécuter des personnes aux États-Unis révèle une pratique cruelle, aléatoire et finalement tortueuse.

Le manque de ressources adéquates pour la défense signifie que les questions relatives à l’innocence et à la culpabilité sont nombreuses dans les affaires de peine de mort. L’exécution la plus récente aux États-Unis, celle d’Ivan Cantu par le Texas en février, s’est déroulée dans un climat de doute quant à la crédibilité des témoins, dont l’un s’est rétracté. Aucun tribunal n’a jamais examiné ces allégations. À ce jour, au moins 195 personnes condamnées à mort aux États-Unis ont été ultérieurement innocentées. Il est difficile de connaître le nombre réel de personnes condamnées à mort à tort, mais il est sans aucun doute beaucoup plus élevé.    

La peine de mort amplifie également les disparités raciales déjà présentes dans le système pénal américain. Les affaires impliquant des victimes blanches sont beaucoup plus susceptibles d’amener les procureurs à requérir la peine de mort, et les personnes de couleur, en particulier les personnes noires, représentent une part disproportionnée des personnes finalement exécutées. Les personnes atteintes de maladie mentale et les personnes souffrant d’un handicap intellectuel sont également représentées de manière disproportionnée dans les couloirs de la mort du pays. Si l’on ajoute à cela le fait que la peine de mort n’est activement appliquée que dans une poignée de comtés dans une poignée d’États, la probabilité d’être exécuté est davantage un reflet de la démographie et de la situation géographique qu’un reflet de l’horreur d’un crime donné.  

Même la mécanique des exécutions est en proie à des problèmes. La tentative ratée de l’Idaho d’exécuter Thomas Creech, 73 ans, en février (le jour même où le Texas a tué Cantu) n’est que l’exemple le plus récent. Selon des chercheurs, plus d’un tiers des exécutions tentées en 2022 ont été bâclées. Les États, qui opèrent trop souvent en secret, bricolent des protocoles de médicaments non testés, expérimentent l’hypoxie à l’azote et envisagent de revenir aux pelotons d’exécution et à la chaise électrique, dans une vaine tentative de trouver un « meilleur » moyen de tuer les gens. Il s’agit d’expériences macabres qui nient le fait que tuer est une pratique intrinsèquement brutale et inhumaine. 

Il est raisonnable de voir cette litanie de dysfonctionnements et d’en conclure que la peine de mort aux États-Unis est défaillante. En fait, pour la première fois depuis que les sondeurs ont commencé à poser la question, les Américains sont plus nombreux à penser que la peine de mort est appliquée de manière injuste que de manière équitable. Il n’est donc pas surprenant que l’opposition publique à la peine de mort atteigne un niveau presque sans précédent.   

Mais dire que la peine de mort ne fonctionne pas, c’est laisser entendre qu’elle peut être corrigée ou réformée pour fonctionner de manière plus juste. Ce n’est pas le cas. L’ACS le comprend et concentre son travail sur la mise en évidence des défaillances juridiques et morales qui sont inexorablement liées à la peine de mort.   

Le huitième amendement de la Constitution américaine interdit les « châtiments cruels et inhabituels ». L’actuelle Cour suprême des États-Unis, contrôlée comme elle l’est par une supermajorité conservatrice, a fait preuve d’un mépris quasi total pour la cruauté de la peine de mort. Mais il devient trop difficile d’ignorer le déclin de la peine de mort aux États-Unis. Le caractère « inhabituel » des exécutions et des condamnations à mort est devenu indéniable.  

Les exécutions et les condamnations à mort ont tendance à diminuer depuis les sommets historiques atteints à la fin des années 1990. Au cours des deux dernières décennies, onze États ont aboli la peine de mort, ce qui porte à 23 sur 50 le nombre d’États où la peine de mort n’est pas appliquée. En outre, six États font actuellement l’objet d’un moratoire sur les exécutions imposé par le gouverneur. Même dans la plupart des États où la peine de mort est encore en vigueur, elle est rarement appliquée. En 2023, seuls cinq États ont procédé à 24 exécutions au niveau national, et seuls sept États ont prononcé 21 nouvelles condamnations à mort. Même dans ces quelques États, seule une poignée de comtés était responsables de la majorité des condamnations à mort et des exécutions.

La rareté des condamnations à mort et des exécutions rend la peine de mort encore plus arbitraire et renforce son caractère inconstitutionnel. Les personnes condamnées à mort ne sont pas les pires des pires, mais simplement des personnes accusées prises au hasard dans la dynamique politique, raciale et régionale d’un système de la peine de mort désespérément dysfonctionnel. En fait, le Centre d’information sur la peine de mort affirme que la plupart des 24 personnes exécutées en 2023 ne seraient même pas condamnées à mort aujourd’hui, en raison « [d]es changements dans la loi, tels que la peine alternative de perpétuité sans possibilité de libération conditionnelle, l’élimination des condamnations à mort non unanimes dans la plupart des États, l’exclusion des personnes atteintes de déficience intellectuelle de l’éligibilité à la peine de mort, et les changements dans la compréhension commune et scientifique de la maladie mentale et des traumatismes et de leurs effets durables… ».   

La peine de mort aux États-Unis est en voie de disparition. Elle est en train de perdre dans les urnes et dans les jurys. Bientôt, le pouvoir judiciaire devra reconnaître qu’il s’agit d’un acte, non pas de justice, mais de vengeance arbitraire et inconstitutionnelle. La question est de savoir combien de souffrances et d’avilissements nous sommes prêt·e·s à tolérer à l’approche de la fin de la peine de mort aux États-Unis.

Texte écrit par Russ Feingold, président, et Christopher Wright Durocher, vice-président chargé de la politique et des programmes, American Constitution Society 

samedi 23 mars 2024

Une médecin légiste a falsifié des preuves ADN pendant trente ans

 

Cette révélation remet en cause des milliers d'affaires criminelles classées et en cours aux États-Unis.

C'est un scandale qui pourrait ébranler le système judiciaire du Colorado. Des milliers d'affaires criminelles classées et en cours sont remises en cause depuis la découverte de l'altération d'échantillons d'ADN par une médecin légiste du Colorado Bureau of Investigation (CBI). Il s'agirait d'une des plus grosses controverses de l'analyse médico-légale aux États-Unis, d'après le Wall Street Journal.

Tout commence en novembre 2023 lorsqu'Yvonne «Missy» Woods, vedette et vétéran de la branche d'analyse scientifique du CBI, démissionne soudainement. Le même jour, le bureau d'enquête annonce avoir découvert des anomalies dans des analyses ADN menées par la médecin et lance une enquête. En décembre, nouveau choc: le bureau avertit les procureurs locaux que, sur les trente ans d'analyses en jeu, certaines données ont été falsifiées. Dans d'autres cas, plusieurs tests avaient été menés sur un même échantillon mais seul un résultat avait été rapporté.

https://www.slate.fr/story/266083/crimes-scandale-adn-etats-unis-enquete-criminelle-medecin-legiste-preuves-falsifiees-yvonne-missy-woods


samedi 2 mars 2024

Peine de mort aux États-Unis : États des lieux 2023-2024 par Sandrine Ageorges Skinner

 Le climat politique aux USA a des conséquences évidentes sur l’évolution de la peine de mort dans le pays. Si les chiffres confirment la tendance à la baisse des dernières années quant au nombre de condamnations à mort et d’exécutions, ceux-ci révèlent qu’en 2023, et pour la première fois depuis 1976, il y a eu plus d’exécutions (23 hommes et 1 femme) que de condamnations à mort (21). Il s’agit de la 9e année consécutive pendant laquelle les USA ont exécuté moins de 30 personnes. La Floride et le Texas sont responsables de 58% des exécutions en 2023. Des 58 mandats d’exécution actifs en 2023, 48% ont abouti, les 52% restant ont bénéficié de sursis. La durée d’incarcération des condamnations est en forte hausse, 54% de ces condamnés sont dans le couloir de la mort depuis plus de 20 ans. Six des vingt-quatre condamnés exécutés en 2023 étaient dans le couloir de la mort depuis plus de trente ans. 

Un nombre important de dossiers d’innocence ont été très médiatisés et n’ont pourtant pas obtenu de cassation ou de révisions de procès. En 2023, trois condamnés à mort ont été innocentés et libérés, soit un total de 195 condamnés à mort innocentés depuis 1973. La Cour suprême a rejeté un nombre alarmant de recours de condamnés à mort, alors que plusieurs élus d’état, (députés ou sénateurs) et procureurs soutiennent plusieurs dossiers d’innocence au Texas, en Oklahoma et au Mississippi. Les recours en grâce dans les juridictions d’état sont remises en question faute de commissions indépendantes, elles ne portent pas leur fruit et leur travail ne fait l’objet d’aucune transparence et/ou redevabilité.

L’état de Floride a ré-instauré la peine de mort pour les violeurs d’enfant, contrevenant à une jurisprudence de la Cour suprême datant de 2008. Le même état a, par ailleurs, fait un grand pas en arrière en abolissant l’unanimité des jurés requise pour une sentence de mort, celle-ci ne requiert désormais que 8 voix pour et non 12 voix. Ces deux nouvelles lois vont, sans aucun doute, mener à une augmentation des condamnations à mort à venir en 2024.

Toutefois, 50% des Américains estiment que la peine de mort n’est pas requise et/ou appliquée de façon équitable. Le président Biden n’a pas aboli la peine de mort fédérale comme il l’avait promis lors de sa campagne pour l’élection présidentielle en 2020, son ministre de la justice a instauré un moratoire sur les exécutions fédérales. Cette même juridiction a requis et obtenu une condamnation à mort l’an dernier.

L’état d’Arizona a suspendu les exécutions à l’arrivée de la Gouverneure Hobbs et le Gouverneur Shapiro en Pennsylvanie a confirmé le moratoire prononcé par son prédécesseur.

Trois états ont mis on vote un texte de loi visant à interdire la peine de mort pour les handicapés mentaux, l’Arizona, l’Arkansas et le Texas. Pour ces deux premiers états, la proposition de loi a été rejetée, au Texas, la Chambre des représentants a approuvé cette loi qui, pour le moment, reste bloquée en commission sénatoriale et n’a pas encore été soumise au vote du Sénat.

Douze états ainsi que le Congrès ont présentés des lois pour l’abolition, tentatives vaines en Ohio et en Louisiane, les autres juridictions étudient cette question attentivement sans pour autant avoir obtenu de résultats concrets en ce début d’année 2024. L’état de l’Iowa tente de ré-instaurer la peine de mort, après l’avoir abolie en 1965, pour les meurtres de policiers et l’État du Tennessee pour les violeurs d’enfant. La Virginie Orientale souhaite également ré-instaurer la peine de mort après l’avoir abolie en 1965.

Deux problématiques inquiétantes se profilent pour 2024.

D’une part les méthodes d’exécution qui prennent une tournure consternante avec l’exécution de Kenneth Smith en Alabama utilisant l’asphyxie à l’azote, une méthode que les vétérinaires rejettent pour l’euthanasie des animaux et qui n’avait jamais été utilisée sur des êtres humains avant le 25 janvier 2024, une mise à mort qui a duré plus de vingt-deux minutes. La Cour suprême des États-Unis n’a pas accordé de sursis (à six voix contre trois) pourtant justifiable par l’application du 8e amendement de la constitution qui interdit les traitements cruels, inhumains et dégradants. Depuis les états du Nebraska et de l’Ohio envisagent d’adopter ce mode d’exécution, d’autres états semblent s’y intéresser faute de pouvoir se procurer les drogues nécessaires à l’injection létale.

D’autre part, l’incertitude politique règne quant à l’issue des prochaines élections en novembre 2024, la probabilité que les démocrates perdent la Maison Blanche, laisse présager un retour potentiel de Donald Trump pour les républicains, ce qui entraînerait probablement la reprise des exécutions fédérales.

Il y a aujourd’hui 2 331 condamnés à mort aux États-Unis.

https://www.ecpm.org/peine-de-mort-aux-etats-unis-etats-des-lieux-2023-2024-par-sandrine-ageorges-skinner/


vendredi 16 février 2024

Disparition de Robert BADINTER

 

Pour tous les abolitionnistes, la disparition de Robert BADINTER est celle du défenseur du droit le plus fondamental pour la personne humaine : le droit à la vie en tous lieux et en toutes circonstances.

Son combat pour l'abolition de la peine de mort ne s'est pas arrêtée aux frontières de la France. D'abord en sa qualité de garde des Sceaux, il porta le projet d'abolition de la majorité de gauche accédant au pouvoir en 1981 mettant un terme à cette abomination encore inscrite à l'époque dans la loi française, dernier pays européen à s'en être affranchi. Son engagement s'est poursuivi avec l'objectif d'éradiquer universellement cette peine capitale et irréversible. Son soutien actif au rassemblement et à la mobilisation des abolitionnistes du monde entier en apportent la preuve. Nos amis de l'association Ensemble contre peine de mort dont il est devenu le Président d'Honneur peuvent en témoigner mieux que quiconque. Pour en savoir plus, cliquez sur ce lien : Accueil – ECPM

Le Collectif français Libérons Mumia gardera en souvenir sa rencontre avec lui en 2016 à Oslo (Norvège) lors du congrès mondial contre la peine de mort - photo en pièce jointe et sa participation à la fête de l'Humanité il y a quelques années pour débattre de la peine de mort et de la situation de Mumia.

La voix de Robert Badinter aura incontestablement contribué à faire progresser le recul de la peine de mort dans le monde. Il y avait une trentaine pays abolitionnistes lorsqu'il monta à la tribune de l'assemblée nationale en 1981 pour défendre la loi d'abolition en France, ils sont aujourd'hui 74% à ne plus exécuter.

Un hommage national lui sera rendu mercredi 14 février place Vendôme à Paris devant le Ministère de la Justice.