(Washington) La Cour suprême américaine a refusé lundi de se saisir du recours d’un condamné à mort, qui aurait pu lui fournir l’occasion de se prononcer sur la légalité de l’usage de l’hypnose par la police.

Agence France-Presse

Le choix de la haute juridiction, qu’elle n’a pas justifié conformément aux usages, laisse en place la condamnation à la peine capitale de Charles Flores pour le meurtre d’une sexagénaire en 1998 au Texas.

Lors de son procès, il avait été identifié par une voisine de la victime qui disait s’être souvenue de lui après une séance d’hypnose réalisée par la police.

L’État du Texas « a eu recours à une “science” désormais discréditée pour présenter au jury un témoignage non fiable », en violation des droits de M. Flores à un procès équitable, ont plaidé ses avocats dans un argumentaire transmis à la haute Cour.

L’hypnose est censée favoriser l’émergence des souvenirs, et notamment de détails potentiellement utiles aux enquêteurs.  

Elle avait gagné en popularité auprès des forces de l’ordre américaines après l’enlèvement en 1976 d’un bus scolaire, dont le chauffeur s’était ensuite rappelé sous hypnose la plaque d’immatriculation d’un ravisseur.

Mais la communauté scientifique est devenue, au fil des ans, de plus en plus sceptique sur son usage dans les enquêtes criminelles.  

Elle « crée des occasions pour tordre la réalité, remplir des trous » et « créé des “super” témoins qui ont une confiance non naturelle dans leurs souvenirs […] et ont donc un impact démesuré sur les jurés », ont écrit 28 spécialistes en sciences cognitives à la haute Cour.

Le département de la Justice appelle aussi à la plus grande prudence dans l’usage de cette pratique. L’information obtenue sous hypnose « ne peut pas être tenue pour exacte. Elle doit être vérifiée et corroborée », selon des directives adressées aux procureurs fédéraux.

Plusieurs États américains, dont le Texas, autorisent pourtant – sous conditions – l’usage lors de procès d’informations obtenues sous hypnose.

Les opposants à la pratique, et notamment les organisations de lutte contre les erreurs judiciaires, espéraient que le dossier de M. Flores fournirait une occasion pour l’interdire.

L’une d’elles, The Innocence Project, avait ainsi demandé à la Cour suprême des États-Unis de répondre à la question du « manque fondamental de fiabilité de l’identification de suspects par des témoins sous hypnose ».

Mais en refusant de se saisir du dossier de M. Flores, ses neuf sages laissent la main aux élus des États.

Au Texas, deux parlementaires ont introduit récemment une proposition de loi pour interdire d’invoquer dans les tribunaux locaux des informations obtenues sous hypnose. « On a besoin du maximum d’intégrité dans le système pénal », a justifié le démocrate Eddie Lucio III cité par le journal Dallas News.